Action 4 : Paradigmes et exercices de gestion de crise en France avant et après Fukushima (Pilote : Olivier Borraz)



En France, la gestion de crise relève de deux dispositifs institutionnels. Au niveau national, l’Organisation Nationale de Crise (ONC) est coordonnée par le Premier Ministre, qui s’appuie sur le Comité Interministériel aux Crises Nucléaires ou Radiologiques (CICNR) et le Secrétariat général de la défense et la sécurité nationales (SGDSN), ainsi que sur la Direction Générale de la Prévention des Risques du M.E.D.D.T.L., le Centre de Gestion Interministériel des crises au Ministère de l’Intérieur, et les membres du CODIR-PA (ASN, IRSN). Au niveau local, lors d'un événement nucléaire, le préfet de département et les divisions territoriales de l’ASN, entre autres, agissent ensemble. Le préfet met en œuvre, s'il le juge nécessaire, le plan particulier d'intervention (PPI) destiné à protéger les populations et l'environnement autour du site accidenté et à apporter à l'exploitant l'appui de moyens d'interventions extérieurs (SAMU, pompiers, médecins, gendarmerie, police). Aussi dans les deux cas s’agit-il de coordonner un grand nombre d’acteurs qui ne partagent pas d’emblée les mêmes cadres d’interprétation et d’intervention. L’action 4 a pour objectif l’analyse de l’évolution des organisations et des doctrines en matière de gestion de crise depuis l’accident de TMI. En reprenant les trois phases définies par le CODIR PA (phases d’urgence, post-accidentelle court terme et post-accidentelle long-terme), elle s’intéressera aux efforts accomplis pour coordonner un nombre croissant d’acteurs institutionnels, aux principes qui sous-tendent cette coordination et aux instruments mis en place pour faciliter les interactions inter-organisationnelles, que ce soit dans l’interprétation des données recueillies, la coordination des interventions ou l’évaluation des actions entreprises.

Cette analyse sera réalisée en deux étapes :

1) une analyse de la structure formelle de l’organisation de crise et de son évolution grâce à l’étude de documents (rapports, doctrines), des entretiens avec les différents acteurs au sein des organisations concernées par la gestion de crise, et l’analyse du REX des crises nucléaires récentes survenues en France. Ces documents et entretiens permettront d’appréhender la succession des différents paradigmes de la crise, et de relier ces évolutions à des facteurs macroscopiques (rôle de l’Etat, des citoyens, gouvernance vs gouvernement) et « techniques » (types de retour d’expérience produits sur les crises, outils informatiques développés pour permettre une coordination des acteurs lors de crises,...).

2) une analyse de cette organisation à travers les exercices de crise. Elle sera conduite dans une première phase sur la base d’entretiens avec les personnes en charge de l’élaboration des scénarios (comment sont-ils constitués et modifiés ? Quelles sont les questions explorées ? Quels sont les enseignements qui sont tirés de ces exercices pour les différents acteurs institutionnels, comment le REX est-il organisé ? Quelles hypothèses ont pu être remises en cause après l’accident de Fukushima ?). Une seconde phase de cette analyse sera basée sur l’observation d’exercices de crise (observation multi-sites, multi observateurs), permettant un suivi détaillé des interactions à partir de différents points de vue sur la crise. On s’intéressera notamment aux preuves de préparation qui sont ainsi revendiquées par les acteurs.

Les résultats attendus sont de trois ordres :

1) Mise en évidence des facteurs de vulnérabilité liés à une complexification croissante des acteurs et dispositifs institutionnels de gestion de crise. La multiplication des instances et instruments, si elle vise une prise en charge de la crise dans ses multiples dimensions, soulève aussi des problèmes s’agissant pour les différents intervenants de communiquer entre eux, de parvenir à des interprétations partagées et de coordonner leurs efforts.

2) Proposition d’améliorations à apporter dans la doctrine de gestion de crise et les exercices de simulation.

3) Introduction d’un plus grand degré de réalisme dans les exercices de simulation.